Texte du sujet: Surnaturel, sujet 2 : "Du classique au fantastique"

C’était un jour heureux, un jour comme tant d’autres chez Madame de Bonnefamille.

Ses quatre adorables chats, Duchesse et ses enfants Marie, Toulouse et Berlioz, faisaient leurs vocalises et lapaient bruyamment le lait de leurs gamelles.

Le maître d’hôtel, Edgar, s’occupait de leur bien-être tout en ruminant son dépit de voir que sa patronne lui préférait ses félins, ces petites choses poilues et sans paroles. Lui qui passait tant de temps à préparer leurs soupers et à récurer leurs coussins et leurs litières !

Il décida un matin de se débarrasser d’eux. Il avait ouï dire que Madame de Bonnefamille, cette vieille femme esseulée, comptait acter sa décision de léguer ses biens à ses chats.

Il revint donc des courses avec un puissant soporifique, qu’il déversa joyeusement dans la mixture destinée à ces sales bêtes. « C’en est fini d’eux ! », pensa-t-il méchamment.

La nuit venue, il savait que « Madame », comme il l’appelait, dormait d’un sommeil profond, fatiguée de ses pas de danse qu’elle répétait sans cesse, et il attrapa donc Duchesse et ses chatons, les mit dans son side-car, et partit les perdre dans la nature. Il était bien trop délicat pour les éliminer de ses mains ! Il laisserait faire la nature : des chats habitués au confort d’une luxueuse maison parisienne ne survivraient pas dans la campagne, face à des animaux accoutumés à la bagarre pour la survie.

Arrivé dans les recoins profonds des limites de la région francilienne, son deux-roues devient bruyant, très bruyant, pour ce calme bucolique ; il en oubliait presque le motif de sa venue.

Une pierre vint faire déraper sa roue, et il fit une embardée. Le panier dans lequel les chats dormaient s’envola, et Edgar ne demanda pas son reste. Il avait vu deux chiens de chasse à proximité, il se doutait qu’ils ne tarderaient pas à le courser, d’autant plus qu’il entendait déjà leurs aboiements.

Il rentra chez Madame, et s’endormit avec la certitude d’être le futur légataire de son employeur.

Pendant ce temps, les chats se réveillaient difficilement, embués par la substance somnifère qu’ils avaient ingérée.

Les vibrisses de Duchesse l’avertirent immédiatement que quelque chose n’allait pas. Elles remuèrent, vers le haut, vers le bas, comme des antennes.

Duchesse appela ses chatons. Si Marie et Berlioz arrivèrent assez vite, il fallait à Toulouse, le gourmand Toulouse, un peu plus de temps pour émerger.

Lorsqu’elle eut rapatrié et toiletté ses chérubins inquiets, Duchesse ferma les yeux. Se concentra. Les rouvrit.

Ils étaient soudainement plus verts, un vert luminescent.

Elle sut. Elle se concentra, encore.

Invoqua le Grand Esprit Félin, celui qui avait déposé ses ancêtres sur cette planète des milliers d’années auparavant, dans un but de conquête.

Les humains, eux, ne savaient rien de tout cela. Ils leurs prêtaient des pouvoirs paranormaux, et ils n’étaient pas loin de la vérité. Pour ces êtres inférieurs, oui, les chats possédaient des pouvoirs quasi-divins. S’ils savaient !

Le Grand Esprit Félin n’était qu’un chef sans réelle identité. C’était un groupe, composé d’individus remplaçables à l’envi.

C’était une sorte de système de pensées, un système pluriel, un amalgame de toutes les capacités et pensées que leur race possédait. C’était un lien, aussi, entre eux, et parfois, avec d’autres espèces un tantinet évoluées, comme l’espèce humaine. Du moins, comme certains de leurs membres.

Cette méditation dura toute l’aube.

Au petit matin, alors qu’Edgar partait faire ses courses, la foudre s’abattit sur lui, étrangement, alors qu’aucun orage ne sévissait sur le ciel parisien.

Le lendemain matin, et alors qu’on annonçait les funérailles du maître d’hôtel, Duchesse, Marie, Toulouse et Berlioz étaient rentrés.

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A-Nacht
Je ne regarderai plus jamais mes chats de la même manière (cela étant dit, je m'en doutais un peu, à force de côtoyer ces bestioles étranges...) !
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AirellaRed
Evite même de les regarder, tu pourrais finir pétrifié!
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AirellaRed
Merci à tous pour vos commentaires!
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Osiem_Syn
Honnêtement, j'avais un peu peur au début que ce soit presque que du réchauffé, mais non, tu as réussi à faire une très belle chute et à éviter le problème !
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plancton2000
Super idée et mise en œuvre :)
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MaHell
je le savais !!! les chats sont les maitres du monde !!!
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