Texte du sujet: Rencontres, sujet 4 : "Rencontre insolite"

Journal de guerre, entrée n° 46-274.

Dans une vie lointaine, on m’appelait Frank Castle. De nos jours, spécialement dans le milieu de la pègre et des grands criminels, mon nom, c’est « The Punisher ». Un nom qui fait trembler jusqu’aux plus grands parrains de la ville. Car aucun n’échappera à ma vengeance.

Suite aux indications d’une petite frappe qui travaille sur le port, j’ai su où trouver cet entrepôt. Je devrais y trouver des armes, des stupéfiants, et ma cible du soir. Au lieu de ça…

Au lieu de ça, une sorte de… Vortex… Une porte vers ailleurs. Quelque chose qui pue la technologie extra terrestre, ou pire, la magie… Tous ces machins là, Dieu sait que c’est pas mon rayon… Mais je ne reculerais pas, même si c’est un piège. Alors je charge mon arme automatique, je fais quelques pas en avant et je me retrouve… En plein milieu d’un désert ?! Pas loin de là sur ma gauche, un avion qui s’est visiblement écrasé. Et derrière moi… Une voix. Enfantine ? « Sil te plaît », sur un ton suppliant.

« S’il te plaît, dessine-moi un mouton ? »

*

* *

L’aviateur était parti je ne sais où, chercher je ne sais quoi, et j’étais tout seul, tout seul à penser à ma fleur, à toutes les fleurs, à l’allumeur de réverbère tout seul sur sa planète, et au renard qui ne tarderait probablement pas à montrer le bout de son nez. Quand soudain, un grand monsieur en colère, tout de noir vêtu, apparût de nulle part ! Comme mon ami l’aviateur n’avait toujours pas dessiné mon mouton – et qu’il était tout de même important, mon mouton ! – je décidais de renouveler ma demande sur cette nouvelle grande personne. Peut importe qu’il soit en colère, c’est comme le renard m’a dit, il faut a-pri-voi-ser, et voilà tout !

Je lui pose donc ma question, et comme il me regarde, interloqué, sans rien répondre (les adultes ne sont vraiment pas très vifs…), je lui répète ma question : « Dessine-moi un mouton, s’il te plaît ! »

*

* *

Journal de guerre, entrée n° 46-275.

Je crois que cet étrange blondinet me demande un mot de passe. Une phrase codée. Il dit « dessine-moi un mouton », et il doit attendre quelqu’un qui lui répondra n’importe quoi, « le vase est dans le pré et le pain est bon », une phrase décidée à l’avance, et alors il saura qu’il peut dire ce qu’il a à dire et donner les informations qu’il a à donner. Mais avec moi, les interrogatoires se font différemment. Je tire en rafale en hurlant de rage, pour bien lui montrer que je ne plaisante pas, et que la prochaine bastos sera pour sa petite gueule d’ange, et je lui dis d’un ton menaçant : « Dit moi tout ce que tu as à dire. Et tout ce que tu sais sur Le Caïd ! »

Il cligne des yeux deux fois, l’air étonné, mais sans être impressionné le moins du monde. Puis il répète, légèrement agacé : « Eh bien j’ai tout dis ce que j’avais à dire ! Je voudrais un dessin d’un mouton !! »

Qui que ce soit, ce petit à du cran… !

*

* *

Ce monsieur est encore plus bizarre que l’allumeur de réverbère, ou que le businessman qui croyait posséder les étoiles. Il criait, il s’agitait, et quand enfin il se mettait à parler, il devenait – de loin – la grande personne la moins intelligible que je n’eusse jamais rencontré ! Patiemment, je répondis à toutes ses questions. Il sembler rechercher désespérément quelqu’un (peut-être était-il très seul ?), alors je lui parlais du Roi, du businessman, de l’allumeur de réverbère, de mon nouvel ami l’aviateur, du buveur, du géographe, de tous ceux que j’avais croisé durant mon voyage, et même du Renard que j’essayais d’apprivoiser. Mais visiblement, il ne cherchait aucun de ceux-là. Il croyait même (les grands sont si naïfs…) que les renards et les roses ne parlaient pas ! Pas étonnant qu’il se sente seul, moi aussi je me serais senti seul, sur ma planète, sans ma fleur !

Pour couronner le tout, il semblait incapable, strictement incapable, de dessiner le moindre mouton… !

*

* *

Journal de guerre, entrée n°46-29 je ne sais plus combien, j’ai perdu le compte…

Il se fait appeler « Le Petit Prince », ce pseudonyme lui va plutôt bien. Il m’a raconté toute son histoire jusqu’à son arrivée sur terre. J’ai beaucoup réfléchi, à l’innocence perdue, à la fatuité de nos existences, j’ai essayé de dessiner un mouton mais je n’ai jamais rien su dessiner d'autre que la tête de mort hideuse qui orne mon costume… C’est alors que le vortex réapparut et m’engloutit sans prévenir. À l’arrivée, me voilà, sans arme, au milieu de Wilson Fisk et de ses plus dangereux sbires. Et moi je ne pense qu’aux fleurs, aux moutons, aux renards, aux réverbères qu’on allume, qu’on éteint, pour rien, sans but, jour après jour, dans une spirale sans fin. Comme ma vie, comme ma vengeance. Sans fin.

Alors que toutes les armes sont braqués sur moi, sans pouvoir réagir autrement, je m’assois par terre, jette un œil implorant sur le Caïd, et lui demande, plein d’espoir : « Sil te plaît… Dessine-moi un mouton ? »

 

 
 

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A-Nacht
-Ah non, j'avais dit "dessine-moi un mouton" pas "décime-moi un mouton !
-Désolé.

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Miloon
C'est couillu je trouve comme "cross-over" ! Purée, jamais je ne m'y serai attendu. Et cette fin ! Ca aussi c'était plus qu'inattendu ! Bravo !
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AirellaRed
Il y a un manque de concordance des temps dans les conjugaisons. Mais j'aime bien l'histoire, et, comme dit plus haut, la chute est touchante.
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PamelaChougne
C'est parfait. Vraiment. Drôle et touchant à la fois. Avec une fin qui donne envie de croire à la rédemption <3 Merci !
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Yoxigen
Merciii :)
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